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SPV MATZAK – Les doubles statuts en question

Nous vous l’annoncions dans notre article du 12 novembre 2020, la CJUE vient de publier,  le 17 mars 2021, son arrêt dans l’affaire C-585/19 où elle indique très clairement que les protections qui découlent de la directive 2003/88, s’appliquent par travailleur et non par contrat, lorsqu’un travailleur a plusieurs contrats avec le même employeur.

Extrait du communiqué de presse de la CJUE :

Dans cette affaire, le tribunal de grande instance de Bucarest demande à la Cour de justice si, lorsqu’un travailleur a conclu avec un même employeur plusieurs contrats de travail, la période minimale de repos journalier prévue à l’article 3 de la directive sur le temps de travail s’applique à ces contrats pris dans leur ensemble ou à chacun desdits contrats pris séparément.

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Or, il n’est pas possible de satisfaire à l’exigence de la directive sur le temps de travail selon laquelle chaque travailleur bénéficie quotidiennement d’au moins onze heures de repos consécutives, si ces périodes de repos sont examinées séparément pour chaque contrat qui lie ce travailleur à son employeur.

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Cette interprétation est également confirmée par l’objectif de la directive, qui est de fixer des prescriptions minimales destinées à améliorer les conditions de vie et de travail des travailleurs par un rapprochement des réglementations nationales concernant notamment la durée du temps de travail. Cet objectif vise à garantir une meilleure protection de la sécurité et de la santé des travailleurs, en les faisant bénéficier de périodes minimales de repos, notamment journalier.

La Cour estime donc que, lorsqu’un travailleur a conclu avec un même employeur plusieurs contrats de travail, la période minimale de repos journalier s’applique à ces contrats pris dans leur ensemble et non à chacun desdits contrats pris séparément.

La Cour de Justice de l’Union Européenne rappelle au point 36 de son arrêt que le droit de chaque travailleur à une limitation de la durée maximale du travail et à des périodes de repos, notamment journalier, constitue non seulement une règle du droit social de l’Union revêtant une importance particulière, mais est aussi expressément consacré à l’article 31, paragraphe 2, de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, à laquelle l’article 6, paragraphe 1, TUE reconnaît la même valeur juridique que les traités.

Elle rappelle ensuite la définition des temps de travail et temps de repos tel qu’il découle de la directive de 2003, et que ces deux notions étaient exclusives l’une de l’autre.

Il est important de rappeler, à ce stade, que cette jurisprudence ne concerne pas les SPV qui ont un contrat de travail avec leur SDIS et un deuxième avec un autre employeur, privé ou public. Mais il est plus que très probable que la CJUE, dans ce cas, trancherai de la même manière, pour les mêmes raisons.

Les doubles statuts dans les SDIS, qu’ils soient sapeur-pompiers, PATS ou infirmier ou médecin, ont un contrat avec le SDIS pour leur activité principale et un autre contrat de volontaire, avec le même employeur. Ils sont donc concernés par cette jurisprudence.

A cet égard, il est important de rappeler la recommandation N° 8 du rapport de la Cour des compte de mars 2019 :

8. adopter un plan de mise en conformité de l’organisation du temps d’activité des sapeurs-pompiers volontaires avec le droit européen et mieux encadrer les activités et le temps de repos des sapeurs- pompiers sous « double statut » (SPP/SPV) [État et SDIS] ;

 Il est aussi important de rappeler un point clé des conclusions de ce rapport réalisé par des magistrats : 

Si le sapeur-pompier volontaire est indéniablement un « travailleur » à qui les protections minimales de la directive européenne 2003/88/CE du 4 novembre 2003 doivent en principe s’appliquer, ce n’était pas là l’option défendue jusqu’à présent par les pouvoirs publics. Il leur appartient désormais de tirer les conséquences de la décision de la Cour de justice de l’Union européenne du 21 février 2018 qui a le mérite de révéler les ambiguïtés du modèle français. En l’état du droit, le scénario de la mise en conformité avec le droit européen apparaît incontournable à court terme. Il est essentiel à cet égard que l’État, les SDIS et les collectivités territoriales identifient les conséquences organisationnelles et financières de l’application de la directive et évaluent le risque de requalification des astreintes.

 

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